Le brigadier-chef Amar Benmohamed avait révélé à StreetPress des maltraitances et du racisme au tribunal de Paris. Il est désormais menacé de sanctions après avoir témoigné à l’Assemblée. « Inacceptable », pour le député Gauvain (LREM) qui l’a auditionné.
Tribunal de grande instance (TGI) de Paris, tard dans la nuit du lundi 22 mars. Le policier Amar Benmohamed est convoqué dans le bureau de son supérieur. Le lieutenant s’est déplacé spécialement sur l’un de ses jours de repos pour cet entretien. Ce n’est pas très bon signe pour le brigadier-chef Benmohamed, d’autant qu’il se sait dans le viseur de sa hiérarchie depuis qu’il a révélé à StreetPress des centaines de cas de maltraitances et de racisme dans les cellules du tribunal.
Amar Benmohamed témoigne
Le lanceur d’alerte Amar Benmohamed, qui a dénoncé le racisme au dépôt du TJ de Paris, a été désarmé devant ses collègues pour l’humilier puis convoqué par sa hiérarchie au service psychiatrique de la Préfecture de Paris.
Humiliations, insultes racistes ou homophobes, privations de nourritures ou d’eau, refus de soins médicaux… Le brigadier-chef Amar Benmohamed révèle sur le site d’informations StreetPress l’existence d’un vaste système de maltraitance dans les cellules du tribunal de Paris, « le plus grand tribunal d’Europe où chaque jour se pressent près de 9 000 personnes ».
« Au total, sur un peu plus de deux ans, plus de mille prévenus ont été maltraités. C’est même sans doute plus », dénonce le brigadier-chef Benmohamed, qui est délégué syndical chez Unité SGP-Police.
Aux insultes racistes récurrentes : « ferme ta gueule, sale bougnoule », « nègro », « sale race », « je te lancerais tout ça dans la Seine », « si on me laissait faire, je mettrais le feu à toutes ces merguez », s’ajoutent, selon Amar Benmohamed, certains faits pour lesquels « on peut presque parler de torture », avec des privations d’eau et de nourriture, qui sont « monnaie courante ».
« Si je parle aujourd’hui, c’est parce que j’ai tout fait [à l’intérieur de la police] pour régler cette affaire et ça a échoué »
Cette décision d’aller au bout de cette bataille, il l’a prise dans la nuit du 11 au 12 mars 2019. Ce jour-là, une gardienne de la paix en poste dans les sous-sols du tribunal, interpelle vertement un détenu qui demande un repas sans porc, rapporte StreetPress :
« Tu prendras ce qu’on te donnera. On en a marre des bougnoules, c’est eux qui nous font chier en France. »
Amar Benmohamed note une augmentation des incidents avec les détenus. Il décide alors de s’intéresser à ces nouveaux d’un peu plus près. Ce qu’il découvre au fil des mois est sidérant. Les insultes racistes, par dizaines. « Ferme ta gueule, sale bougnoule », « nègro », « sale race ».