« On était autour du feu, et elle s’est endormie sur mes genoux. Son père m’avait demandé à plusieurs reprises de l’emmener rejoindre sa famille à Leeds, à 3 ou 4 miles de chez moi. Je ne pouvais pas la laisser là. Je suis désolé », témoigne Rob Lawrie, le regard vide et absent.
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Originaire de la banlieue de Leeds dans le nord de l’Angleterre, Rob Lawrie était jugé ce 14 janvier au tribunal de Boulogne-sur-Mer pour avoir tenté de faire passer en Angleterre la petite Bahar, une Afghane de 4 ans qui vivait dans un bidonville à Calais. Le 24 octobre dernier, avec l’accord du père de la fillette, Rob cache la petite fille dans son van avant son grand périple.
Le soir même, vers 23h, le chauffeur est contrôlé au terminal ferry. Les chiens policiers détectent la présence d’Érythréens cachés à l’arrière du véhicule, à l’insu de Rob Lawrie, placé en garde à vue. C’est vers 2 heures du matin qu’il finit par avouer qu’une petite fille est cachée au-dessus du siège du chauffeur, dans une cache aménagée en couchette, d’1,30 sur 50 centimètres, selon Liberation. Quand les policiers ouvrent la cache, la petite dort.
« Dans les années 50 aux Etats-Unis, il était illégal pour les Noirs et les Blancs d’être assis côte à côte. Et maintenant on se dit "quelle vaste blague!" Un jour on dira : «Oh mon Dieu, à une époque on laissait les enfants dans de sordides camps de réfugiés, et ils n’allaient pas à l’école » insiste t-il. Ce dernier affirme qu’il n’a pas été financé en retour : « Il est hors de question que je fasse ce genre de chose pour l’argent. Elle a 4 ans, elle est très intelligente, elle vit dans une tente, dans un lieu dangereux et très froid. » Le président lui parle de « mise en danger», de «conditions de transport». «Si je n’avais pas eu un compartiment de couchage, si j’avais voyagé dans une voiture je ne l’aurais pas imaginé le faire. C’était très confortable. Elle était en sécurité. »
Finalement, Rob Lawrie n’écopera que de 1000 euros d’amende avec sursis. Le procureur, touché par la détresse qui la poussé à ce geste, plaide néanmoins des « conditions indignes du passage », une « mise en danger de la vie d’autrui »: « On ne peut pas faire n’importe quoi. Elle n’avait pas de ceinture de sécurité, pas de réhausseur prévu par la loi, en cas de choc frontal, elle devenait un boulet de canon qui s’écrasait contre le pare-brise. Sa vie était en danger. »
Entendu comme témoin, Christian Salomé, président de l’association « L’auberge des migrants » explique au tribunal : « Il y a 5000 personnes dans la jungle, dont 500 à 600 enfants, dont des nouveau-nés. Jusqu’à lundi dernier, il n’y avait rien pour abriter les pères avec enfant, sauf les cabanes de la jungle, qu’on peut comparer au confort d’un abri de jardin. Les enfants vivent dans le froid et pataugent dans la boue. C’est difficile de rester insensible. De donner à manger, puis de rentrer chez soi. Ces enfants ont l’âge de nos petits enfants. Je comprends très bien ce monsieur qui à un moment donné n’a pas réussi à la laisser là. Des relations naissent, c’est le propre des humains. »