Chez moi, mes enfants palestino-américains, qui n’ont jamais mis les pieds en Palestine, se posent souvent cette question lorsqu’ils voient une marque : « Est-ce sur la liste de boycott ? » C’est une question devenue une seconde nature pour eux, un rappel que la lutte pour la justice en Palestine est autant une question de principes que d’action. Cette nouvelle génération, façonnée par des mouvements comme Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS), prouve que la cause palestinienne reste transcendantale et incontournable. Le mouvement de boycott croissant n’est pas seulement un outil de résistance, mais aussi un impératif moral et la forme de résistance populaire la plus puissante dans le monde. Cette année, nous a montré à quel point ce mouvement a progressé et à quel point il peut aller loin.
Le mouvement de boycott a gagné un élan extraordinaire en 2024, alimenté par l’indignation mondiale face à la violence croissante d’Israël contre les Palestiniens. Les manifestations publiques se sont transformées en une résistance économique soutenue, avec des consommateurs qui se sont activement retirés des entreprises complices des politiques d’apartheid d’Israël. Starbucks est un exemple de marque mondiale ayant ressenti la pression économique. Les rapports indiquent que le géant du café a perdu des millions de revenus en raison des campagnes ciblées de boycott et des manifestations dans plusieurs villes. Les militants ont souligné les liens de l’entreprise avec des groupes de lobbying pro-Israël, en faisant un symbole de la révolte des consommateurs contre la complicité. Ce coup financier illustre la puissance croissante du boycott, obligeant même les plus grandes entreprises à prendre en compte leurs associations. Pourtant, la véritable histoire réside dans la peur d’Israël face à ce mouvement. Des lois ont été adoptées aux États-Unis pour tenter de supprimer les boycotts contre Israël, exposant la fragilité d’un État qui repose sur la complicité mondiale pour maintenir son occupation.
Dans mon État d’origine, le Texas, une enseignante palestinienne a été licenciée pour avoir refusé de signer un serment promettant qu’elle ne boycotterait pas Israël. Sa position fondée sur des principes a suscité l’indignation et inspiré le documentaire de 2021 Boycott, qui met en lumière la manière dont ces lois violent les droits constitutionnels de base. Des Américains de tous horizons politiques, qui autrement n’auraient peut-être pas soutenu la cause palestinienne, ont commencé à se demander pourquoi on leur interdit de boycotter une nation étrangère, surtout lorsqu’une nation qui reçoit des milliards de dollars de l’impôt américain, tandis que nos propres communautés peinent à joindre les deux bouts.
Le mouvement de boycott n’est bien sûr pas nouveau. Ses racines se trouvent dans les luttes contre l’apartheid en Afrique du Sud, où la stratégie d’isolement économique a joué un rôle central dans le démantèlement du racisme institutionnalisé.
Le mouvement BDS, lancé par la société civile palestinienne en 2005, s’inspire de cet héritage, reliant la lutte pour la libération de la Palestine aux luttes plus larges contre l’injustice.
« Il nous rappelle que la lutte pour la liberté, partout dans le monde, est liée à la lutte pour la liberté partout ailleurs. »
Cette connexion trouve une résonance particulière dans le Sud global. Les pays ayant une histoire de résistance anticoloniale voient la cause palestinienne comme faisant partie de leurs propres combats inachevés pour la dignité et la souveraineté. En mobilisant ces gouvernements et leurs peuples, le mouvement de boycott a le potentiel d’amplifier son impact, comme il l’a fait en Afrique du Sud. Le soutien du Sud global renforce une vérité essentielle : les boycotts ne concernent pas seulement des choix de consommateurs ; il s’agit du pouvoir collectif.
Contrairement à la résistance armée, les boycotts ciblent les infrastructures économiques et politiques qui soutiennent l’occupation israélienne de la Palestine, obligeant ainsi les gouvernements et les entreprises à rendre des comptes. Le mouvement est efficace, décentralisé et enraciné dans l’activisme de base. C’est précisément pour cette raison qu’Israël craint le mouvement de boycott. Il ne repose pas sur les élites politiques, mais mobilise plutôt des gens ordinaires — consommateurs, travailleurs, étudiants — partout dans le monde.
Cependant, la répression excessive d’Israël contre le mouvement se retourne contre lui. Les lois criminalisant les boycotts et ciblant les militants attirent encore plus l’attention sur la cause. Elles soulèvent également des questions sérieuses pour les Américains qui n’acceptent pas qu’on leur dise qu’ils ne peuvent pas exercer leur droit constitutionnel de protester, en particulier contre un gouvernement étranger. Cette répression excessive inspire, non seulement en termes de solidarité palestinienne, mais aussi dans un mouvement plus large pour la liberté d’expression et la justice.
Pour capitaliser sur les succès de 2024, le mouvement de boycott doit se concentrer sur la coordination, l’inclusion et l’innovation. Il existe plusieurs actions possibles à entreprendre.
Par exemple, des plateformes comme l’application Boycott sont des exemples puissants de la manière dont la technologie peut être utilisée pour simplifier l’activisme.
« L’application permet aux utilisateurs d’identifier les entreprises et les produits à boycotter. »
Cela rend la participation accessible et éclairée. Investir dans de tels outils peut porter le mouvement à de nouveaux sommets.
De plus, tout comme l’a fait le mouvement anti-apartheid, le BDS doit continuer à lier la lutte palestinienne aux mouvements mondiaux pour la justice. Que ce soit à travers des alliances avec des militants des droits des peuples autochtones, des défenseurs de la justice climatique ou des syndicats, ces connexions renforcent l’argument moral et politique en faveur de la Palestine.
Au cœur du boycott, il y a les gens. Partager les histoires des Palestiniens — familles déplacées, agriculteurs privés d’accès à leurs terres, enfants emprisonnés — humanise le mouvement et rappelle au monde que la lutte ne concerne pas seulement des politiques abstraites, mais aussi des vies et des avenirs.
Le mouvement de boycott a prouvé être l’un des outils les plus puissants de résistance contre l’apartheid et l’oppression. Il transcende les frontières et les idéologies, unissant les gens dans une demande commune de justice. En 2024, il nous a montré sa force ; en 2025, il doit nous montrer sa résilience. Pour les Palestiniens et leurs alliés, la lutte est loin d’être terminée. Et comme mes enfants me le rappellent à chaque fois qu’ils demandent la liste de boycott, la prochaine génération d’activistes est déjà en train de se lever. Ils apprennent que la justice n’est pas un moment ; c’est un mouvement. Et c’est un mouvement qui ne sera pas réduit au silence.