Le délit de « sale gueule », tout le monde en a entendu parler, certains en ont été les victimes. Pour un français d’origine étrangère, débuter une vie active, relève du parcours du combattant. Envoyer un CV, où apparaît votre nom, à consonance étrangère, votre photo, avec votre joli minois à l’allure exotique, autant d’handicaps qui vous éloignent de l’emploi que vous briguez tant, et pour lequel vous seriez si compétent.
Devant une telle discrimination, certains, ont suggéré des CV anonymes, sans nom ni photo, bonne idée ! jusqu’au moment où vous débarquez le jour de l’entretien, là plus question d’anonymat !
Comme si tous ces obstacles ne suffisaient pas, les employeurs ont trouvé le moyen d’encore mieux cibler les candidats à l’embauche et à trouver la perle rare, façonnée à leur convenance : le profil facebook.
Avec plus de 26 millions d’inscrits en France, il représente un puit d’informations privées en tout genre. Ce que vous ne dites pas dans votre CV, vos futurs employeurs le dénicheront en fouillant votre profil.
Voilà un nouveau facteur de discrimination à l’embauche, comme constaté dans une étude diligentée par 3 chercheurs en sciences économiques de l’université Paris-Sud et relayée par Le Monde.
L’expérience s’est avérée très intéressante et en dit long sur l’importance de facebook dans les décisions des recruteurs. Nos 3 chercheurs ont répondu, pendant un an, à 837 offres d’emplois pour des postes de comptables dans la région parisienne. Postant des CV fictifs dont les contenus étaient similaires, hormis les profils facebook des pseudo-candidats.
Lors de la première partie de l’expérience, des CV ont été envoyés au nom de Stéphane Marcueil et Thomas Marvaux, des noms fictifs créés pour l’occasion. Des faux comptes facebook, reprenant une expérience, une formation, des photos, des lieux de résidence et des diplômes similaires. La seule différence insérée volontairement concerne le lieu de naissance et la langue parlée. Le premier est né à Marrakech et parle l’arabe, le second est né à Brive-la-Gaillarde et parle l’italien.
Rien d’étonnant de découvrir que Stéphane Marcueil (né à Marrakech) ne récolte que 13,4% de réponses positives, contre 21,3% pour Thomas Marvaux. Soit un taux de 1,5% supérieur !
Dans la seconde partie de l’étude, les noms ont été inversés, tout en gardant les mêmes profils facebook.
Etrangement, les scores s’inversent, 13% pour le candidat né à Marrakech, et 8% seulement pour celui originaire de Brive-la-Gaillarde.
Que s’est-il passé ?
Pas de changement dans les mentalités, ne nous leurrons pas, il s’agit simplement de la nouvelle formule facebook, qui a procédé à une modification des pages, la langue n’apparaît plus de manière aussi flagrante.
Il est clair que les réseaux sociaux sont entrés dans les mœurs et font partie intégrante de notre vie et de celle des entreprises, qui cherchent à recruter et qui n’hésitent pas à utiliser tous les moyens mis à leur disposition.
Le taux de chômage atteint de manière plus importante les français d’origine étrangère que les français de souche. Réseaux sociaux, CV ou entretiens, les inégalités sont toujours aussi présentes.