Les propos islamophobes et les agressions font quasi partie du quotidien et n’émeuvent pas les autorités qui se contentent d’enregistrer les plaintes pendant que les criminels continuent à vaquer à leurs occupations en toute quiétude.
Alors comment s’étonner lorsque cette boutique de cosmétiques afro fraîchement inaugurée, située dans le 2ème arrondissement de Paris entre le boulevard de Bonne Nouvelle et la rue Réaumur, retrouve placardée sur la devanture un message haineux où on pouvait lire : « Vous êtes là mais vous n’êtes pas les bienvenus ».
Pourtant la boutique Colorful Black, spécialisée dans les produits cosmétiques africains, est installée dans le quartier depuis six ans mais occupait jusque-là un espace réduit qui ne convient plus aujourd’hui à la demande de la nombreuse clientèle.
Pour pallier à la demande sans cesse croissante, Anne-Marie Mendy et Frédéric son compagnon ont décidé d’opter pour un nouveau magasin beaucoup plus spacieux non loin de là.
Malheureusement ce choix ne semble pas faire l’unanimité dans le quartier qui craint de voir débarquer une population pas très couleur locale.
Le message ne laisse aucune place au doute :
« Nous ne voulons ici pas de boutique AFRO de vente de cheveux en plastique ». L’avertissement est clair et le premier réflexe d’Anna, qui n’est finalement pas vraiment étonnée, est de déchirer la feuille. « Frédéric et l’employée étaient choqués, mais moi ça ne m’étonne pas, explique Anna. C’est triste parce qu’on est en 2016… Mais le racisme n’est pas fini » ajoute-t-elle.
Habitué aux discriminations, le couple a choisi le 95 pour élever ses enfants : « Je leur apprends à être fiers de leurs cheveux, de leur couleur. Mais je vois la différence de traitement, quand on va en voyage par exemple » raconte la mère. Malgré tout, c’est bien la première fois que la haine qu’elle croise habituellement dans les rues la rattrape sur son lieu de travail.
« Mes clients ne viennent pas danser ou crier dans la rue devant la magasin, dit-elle agacée. « Je sais très bien que c’est l’enseigne qui les dérange, si on l’enlevait, on serait juste un magasin de cosmétique comme les autres. Mais je suis fière de ce que je vends ».
Un racisme qu’elle ne s’explique pas, tout comme les commerçants du quartier pourtant cosmopolite où une multitude de communautés se côtoient quotidiennement sans souci. Eddy y tient un commerce de tissu depuis 32 ans, il ne comprend pas : « J’ai vu [Anna] nettoyer les traces de l’affiche, j’ai été vraiment très surpris. On a jamais eu de problèmes de racisme ». Pour lui, le coin a changé : « Ça devient un peu plus bobo, maintenant, il y a plus d’habitations que de commerce ».
L’acte raciste a été largement dénoncé dans les réseaux sociaux et les marques de soutien à Anna Mendy lui ont fait chaud au cœur.