Interrogeant la maire de Paris Anne Hidalgo avec ses liens avec le parti EELV, Ruth Elkrief a cité dans son argumentaire l’accointance supposée du député Julien Bayou avec « le CICF, le fameux conseil islamique » qui n’est autre que le CCIF, association venant en aide aux victimes de racisme et d’islamophobie en France.
Dissolution du CCIF
Le Ministère de l’Intérieur a adressé une notification de dissolution au Collectif Contre l’Islamophobie en France (CCIF), alors que cette dernière a déjà transféré son siège social et ses activités à l’étranger indique dans un communiqué officiel.
« Aujourd’hui, 19 novembre 2020, le ministre de l’Intérieur, cédant aux appels de l’extrême droite, a notifié au CCIF un courrier l’informant d’un projet de dissolution.
Le CCIF, conformément à ce qui a été annoncé le 29 octobre dernier, a déjà déployé une large partie de ses activités à l’étranger.
Le projet de dissolution du CCIF est donc sans objet.
Son siège social a été transféré à l’étranger.
Il continuera à apporter son assistance juridique aux personnes victimes d’islamophobie et informera les instances internationales de l’état d’avancement de la lutte contre les discriminations et pour l’égalité en France. »
Le CCIF quitte la France
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a engagé, mardi 20 octobre, la dissolution du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) et l’association humanitaire BarakaCity, structures qualifiées d’ « ennemis de la République ». Face à ce bras de fer juridique, le CCIF annonce par le biais d’un communiqué son intention de quitter la France.
« Cela fait une semaine que le CCIF est calomnié sans discontinuité et que s’est exprimée, à l’échelle nationale et dans beaucoup de médias, une véritable haine à l’encontre de notre association, accompagnée de milliers de messages d’insultes et de menaces sur les réseaux sociaux, sans la moindre réaction du gouvernement, pourtant censé être en pointe sur ces sujets. Bien que nous ayons toujours été attaqués dans le débat public, même par des figures politiques qui se sont succédés ces dix dernières années, la diffamation et les accusations mensongères qui sont aujourd’hui portées à notre encontre marquent un véritable tournant dans le processus de déstabilisation dont nous faisons l’objet, en tant qu’association de défense des droits humains.
Depuis une semaine, des personnalités politiques, des polémistes et certains médias ont essayé, par tous les moyens, d’impliquer le CCIF dans l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine. Le ministre de l’intérieur a très vite déclaré que le CCIF serait « manifestement impliqué » dans ce drame et a aussitôt annoncé vouloir dissoudre notre association. Et ce en dépit des faits, démontrant sans ambiguïté que le CCIF n’a pas la moindre implication dans cet assassinat abject.
Aucune association antiraciste n’avait jamais eu droit à un tel traitement en France. L’accusation dont nous faisons l’objet est malheureusement une illustration extrême de ce que subissent de nombreux musulmans — ou supposés musulmans — en France : le soupçon de solidarité avec les terroristes en cas de silence, et l’accusation de dissimulation hypocrite (taqiyya) en cas de prise de parole.
Pendant que le pays est touché par l’émotion, on reprochera toujours aux « musulmans » de ne pas suffisamment condamner le terrorisme, de ne pas suffisamment se montrer dans les manifestations, et ainsi de suite ; pour enfin justifier des représailles et construire une rhétorique de vengeance.
Nous l’avons vu et vécu de près, au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, en étant pleinement mobilisés pour le respect de l’état de droit et la préservation des libertés fondamentales. Nous avons montré comment, en cinq ans, l’islamophobie s’est normalisée petit à petit et comment des dispositifs gouvernementaux, sous couvert de lutte contre la radicalisation et le terrorisme, ont participé de cette stigmatisation.
Aujourd’hui, nous payons le prix de cette démonstration.
Et la campagne de déstabilisation et de destruction qui nous vise illustre exactement, si c’était nécessaire, le phénomène que nous dénonçons avec constance et méthode.
Au sein de l’équipe du CCIF, nous vivons cette annonce de dissolution comme un véritable déni politique et institutionnel du racisme antimusulman. Elle adresse un message terrible aux citoyens de confession musulmane : vous n’avez pas le droit de défendre vos droits. Et l’association qui fait valoir les lois de notre démocratie pour vous assister dans le respect de vos libertés est désormais une cible.
Face à cette annonce de dissolution, une large mobilisation s’est exprimée en faveur du CCIF au niveau national et international, mettant en évidence l’importance de la liberté d’association et le danger de remettre en cause de l’État de droit. Depuis que nous existons, c’est cette liberté qui nous a permis de préserver les libertés fondamentales des personnes de confession musulmane. Aujourd’hui, tout ce que nous avons essayé de donner auparavant nous revient sous forme de soutien profond et de confiance dans notre action, à travers des dizaines de milliers de soutien exprimés, en France comme à l’international.
Le CCIF est plus que jamais consolidé de soutiens et de partenaires. La mobilisation des derniers jours vient renforcer nos moyens pour apporter une assistance plus efficace aux victimes d’islamophobie. Néanmoins, la situation en France est hautement problématique : le gouvernement a délibérément tenté de porter atteinte à l’intégrité du CCIF en le qualifiant d’ « ennemi de la République », pour avoir simplement mis en évidence des dérives dans le respect des droits. Et il est malheureux de le dire, car nous avons toujours gardé une grande confiance dans la justice de notre pays, mais aujourd’hui la situation est simple :
En tant que défenseurs des libertés fondamentales des musulmans, notre association et nos équipes ne sont plus en sécurité en France.
C’est notamment dans ce sens que nous avons déclenché des saisines en vue d’activer la protection des organisations internationales, prévues pour les structures comme la nôtre.
Notre analyse nous conduit à une décision claire :
Aujourd’hui, quelle que soit l’issue de cette annonce de dissolution, le CCIF doit internationaliser ses activités pour mieux protéger son travail.
C’est pourquoi nous avons activé un plan d’ampleur permettant de déployer une large partie de nos activités à l’étranger, en renforçant et en diversifiant nos projets dans la continuité de notre travail actuel : le renforcement de l’assistance juridique, l’observation statistiques et scientifique de l’islamophobie, le développement de projets internationaux, la création d’un média spécialisé et d’une structure de productions culturelles.
Ainsi, non seulement la sécurité et la continuité des activités du CCIF seront assurées contre toute tentative d’intimidation ou de déstabilisation, mais elles seront également consolidées et renforcées par des moyens nationaux et internationaux. »