Il y a une vidéo que Benjamin Netanyahu, le Premier ministre israélien, doit regretter. Le segment de 10 minutes a été diffusé à l’origine en hébreu sur la chaîne israélienne 10. Son contenu, cependant, menace de gravement embarrasser non seulement Netanyahu mais aussi l’administration américaine.
Le film a été tourné, apparemment à l’insu de Netanyahu, il y a neuf ans, lorsque le gouvernement d’Ariel Sharon avait commencé à envahir les principales villes de Cisjordanie pour écraser la résistance palestinienne au début de la deuxième Intifada.
À l’époque, Netanyahu avait pris une courte pause de la politique mais allait bientôt rejoindre le gouvernement de Sharon en tant que ministre des Finances.
Lors d’une visite dans une maison de la colonie d’Ofra en Cisjordanie pour présenter ses condoléances à la famille d’un homme tué dans une fusillade palestinienne, il fait une série d’admissions sans surveillance sur sa première période en tant que Premier ministre, de 1996 à 1999.
Assis sur un canapé dans la maison, il raconte à la famille qu’il a trompé le président américain de l’époque, Bill Clinton, en lui faisant croire qu’il aidait à mettre en œuvre les accords d’Oslo, le processus de paix parrainé par les États-Unis entre Israël et l’Organisation de libération de la Palestine, en effectuant des retraits mineurs de Cisjordanie tout en renforçant l’occupation. Il se vante d’avoir ainsi détruit le processus d’Oslo.
Il rejette les États-Unis comme étant «facilement déplacés dans la bonne direction» et qualifie d’absurde les niveaux élevés de soutien populaire américain à Israël.
Il suggère également que, loin d’être défensive, la dure répression militaire israélienne du soulèvement palestinien visait principalement à écraser l’Autorité palestinienne dirigée par Yasser Arafat afin qu’elle puisse être rendue plus souple pour les diktats israéliens.
Toutes ces affirmations ont des parallèles évidents avec la situation actuelle, lorsque Netanyahu est à nouveau le Premier ministre d’Israël face à une Maison Blanche qui tente de l’entraîner dans un processus de paix qui va à l’encontre de son programme politique.
Comme auparavant, il a ostensiblement fait des concessions publiques à l’administration américaine – principalement en acceptant en principe la création d’un État palestinien, en acceptant des pourparlers indirects avec les dirigeants palestiniens à Ramallah et en mettant en œuvre un gel temporaire de la construction de colonies.
Mais il a également enrôlé le puissant lobby pro-israélien pour faire pression sur la Maison-Blanche, qui semble avoir cédé à ses stipulations les plus importantes.
Dans le journal libéral Haaretz, le chroniqueur Gideon Levy a qualifié la vidéo de «scandaleuse». Il a dit que cela prouvait que Netanyahu était un «escroc… qui pense que Washington est dans sa poche et qu’il peut lui tirer la laine sur les yeux». Il a ajouté que le Premier ministre n’avait pas réformé dans l’intervalle: «Une telle façon de penser tordue ne change pas au fil des ans.»
Dans le film, Netanyahu dit qu’Israël doit infliger «des coups [aux Palestiniens] qui sont si douloureux que le prix sera trop lourd à supporter… Une large attaque contre l’Autorité palestinienne, pour les amener au point d’avoir peur que tout soit s’effondrer. «
Lorsqu’on lui a demandé si les États-Unis s’y opposeraient, il répond: «L’Amérique est quelque chose qui peut être facilement déplacé. Déplacés dans la bonne direction… Ils ne nous gêneront pas… Quatre-vingt pour cent des Américains nous soutiennent. C’est absurde. »
Il raconte ensuite comment il a traité avec le président Clinton, qu’il qualifie d ‘«extrêmement pro-palestinien». «Je n’avais pas peur de manœuvrer là-bas. Je n’avais pas peur de me heurter à Clinton.
Son approche des demandes de la Maison Blanche de se retirer du territoire palestinien en vertu des accords d’Oslo, dit-il, s’est inspirée de la philosophie de son grand-père: «Il vaudrait mieux donner deux pour cent que de donner 100 pour cent.»
Il a donc signé l’accord de 1997 pour retirer l’armée israélienne d’une grande partie d’Hébron, la dernière ville palestinienne sous occupation directe, afin d’éviter de concéder davantage de territoire.
«Le truc», dit-il, «est de ne pas être là [dans les territoires occupés] et d’être brisé; l’astuce est d’être là et de payer un prix minime.
Le «truc» qui a arrêté de nouveaux retraits, ajoute Netanyahu, était de redéfinir quelles parties des territoires occupés comptaient comme un «site militaire spécifié» selon les accords d’Oslo. Il voulait que la Maison Blanche approuve par écrit le classement de la vallée du Jourdain, une vaste zone de Cisjordanie, en tant que tel site militaire.
«Maintenant, ils ne voulaient pas me donner cette lettre, donc je ne leur ai pas donné l’Accord d’Hébron. J’ai arrêté la réunion du gouvernement, j’ai dit: «Je ne signe pas.» Ce n’est que lorsque la lettre est arrivée… que j’ai signé l’Accord d’Hébron. Pourquoi est-ce important? Parce qu’à ce moment-là, j’ai arrêté les accords d’Oslo.
La semaine dernière, après avoir rencontré Obama à Washington, le Premier ministre israélien a accordé une interview à Fox News dans laquelle il ne semblait pas pressé de faire des concessions: «Pouvons-nous avoir une paix négociée? Oui. Peut-il être mis en œuvre d’ici 2012? Je pense que cela va prendre plus de temps que cela », a-t-il déclaré.
Il doit y avoir au moins un soupçon très fort que Netanyahu est aussi fermement engagé aujourd’hui qu’il l’était alors à détruire toute chance de paix avec les Palestiniens.